Je me suis lancé un défi à la noix, en janvier: celui de réaliser une vidéo (ou une série de vidéos, qui sait) traitant de hacking au sens large, entièrement réalisée à partir de logiciels libres et de contenu libre de droit. Juste comme ça, pour sortir de ma zone de confort, parce que pourquoi pas, après tout. Je n'ai aucune intention de devenir "vidéaste" sur Youtube, ni de battre PewDiePie. Encore moins de gagner ma vie en faisant cela. Ce billet de blog retrace ainsi la genèse de ce projet, et comment j'ai réussi à faire une petite vidéo (et à quel prix).
Début 2019, je décidais de retourner voir ce que devenait le projet Peertube initié par Framasoft dans sa volonté de dégoogliser Internet. Et j'ai été agréablement surpris: les vidéos étaient fluides, les contenus variés, et l'interface plutôt ergonomique ! Du coup, je suis tombé sur quelques vidéos qui m'ont intrigué, et de fil en aiguille j'ai reproduit ce qu'il m'arrive de temps en temps sur Youtube: je suis resté environ 2 heures à passer de vidéo en vidéo, découvrant des facettes insoupçonnées de l'Internet, du DIY et de certains vidéastes.
Et c'est à cet instant précis, à deux heures du matin devant mon écran, que je menu suis dit que ça serait intéressant de faire une série de vidéos traitant de DIY, de hacking, de coding, bref de divers sujets que je traite habituellement sur le blog, mais sur un autre format. Cela peut être plus intéressant, amener un peu plus de vie et pourquoi pas montrer plus en détail certaines réalisations là où les photos sont limitées.
Plus j'y pensais, plus l'idée me séduisait. J'avais déjà touché à des logiciels de montage vidéo comme KDEnlive, je connaissais les bases disons dans ce domaine, mais de là à faire une vraie vidéo ... Sans parler du fait que je n'aime pas me filmer et encore moins entendre ma voix (ce qui explique que j'ai horreur de regarder les vidéos de mes prestations en conférence).
Ah, et tant qu'à publier une vidéo sur une instance Peertube, autant qu'elle soit réalisée entièrement à l'aide de logiciels libres et de contenu libre de droits. Car bon, il s'agirait d'anticiper tout de même les problèmes futurs que posera l'article 13 de la directive Copyright, sait-on jamais.
Ayant déjà réalisé du montage vidéo sous Linux avec KDEnlive, je savais au moins une chose: ce logiciel ne fait que planter et il est laborieux de mener un projet à bien sans expérimenter un ou deux plantages bien sentis, avec perte du travail en cours à la clef. C'est bien simple, quasimment tous les tutoriaux sur KDEnlive indiquent d'abuser du CTL-S pour être sûr de ne rien perdre.
J'avais déjà cherché en 2018 un autre logiciel de montage (merci Twitter):
Hey Twitter, is there any good video editing software other than KDEnlive you would recommend ? #justasking
— Damien Cauquil (@virtualabs) 29 décembre 2018
Et l'on m'avait aiguillé sur Blender. Quoi ? Blender ? Mais c'est pour faire des images ou animations en 3D, me disais-je naïvement. En effet, mais il intègre aussi un Video Sequence Editor, autrement dit un outil de montage assez puissant car il permet de mixer des séquences 3D générées à des prises de vues réelles par exemple comme le montre ce petit tutorial expliquant la base du masquage avec Blender:
Après quelques tests, il me fut évident que Blender pouvait faire l'affaire en ce qui concerne l'édition vidéo. Il restait ensuite à trouver un logiciel pour réaliser des animations 2D, notamment pour le pseudo-générique et les titres. Là encore l'open-source est venu à la rescousse, avec Synfig. Cet outil permet de réaliser des dessins animés, mais aussi des animations en 2D à partir d'objets vectoriels (et donc compatible SVG). Avec du recul, cette idée était complètement débile, Blender étant tout à fait capable de faire cela (et même largement plus !). J'ai appris par la suite à manipuler un peu mieux Blender pour faire ce genre d'effet, et c'est juste surpuissant.
Et enfin, j'ai opté pour Audacity pour les enregistrements de voix et LMMS pour la composition musicale. Oui, rappelez-vous, je vous ai dit que je voulais avoir du contenu libre de droits. Et quoi de plus simple que de faire soi-même sa musique ? Zone de confort, me dites-vous ? En vérité, je suis une bille en musique. Je ne prétends pas avoir l'oreille musicale, et encore moins l'oreille absolue, mais j'avoue que pour le coup c'était certainement le plus grand challenge.
(Bon par contre j'ai utilisé une image d'enfants qui elle n'est pas libre de droits, c'est mal, je l'avoue, mais je ne pouvais décemment pas mettre une photo d'un de mes minis-moi alors j'ai préféré mettre ceux des autres)
Je ne suis pas vidéaste, et sais pertinemment que l'on ne s'improvise pas vidéaste comme cela (quoiqu'en dise Youtube). Aussi, j'ai pu m'appuyer sur du matériel abordable pour la réalisation de cette vidéo, comme par exemple mon micro USB Bird UM1 que j'avais initialement acheté pour éviter les galères de son dans les podcasts auxquels j'ai participé (coucou NoLimitSecu), ou encore mon smartphone Huawei Mate 20 lite (avec des portes dérobées dedans) pour la prise de vue. J'ai tout de même investi dans un GorillaPod, histoire de pouvoir filmer les mains libres.
Enfin, j'ai pu réinvestir les sommes mirobolantes que j'ai gagné en faisant du Bug Bounty dans un clavier MIDI d'entrée de gamme, ce qui est quand même plus sympa pour jouer que le clavier de mon ordinateur. Prends ça, Freddy Mercury.
Réaliser les vidéos m'aura pris plusieurs soirées et après-midi (sans parler des Gibi-octets de stockage que ça requiert), tandis que l'enregistrement des voice over aura été la chose la plus laborieuse que j'ai faite. Je trouve toujours le rendu pas top de ce côté là, mais c'est certainement parce que je lis un peu trop au lieu d'essayer d'expliquer naturellement. Croyez-le ou pas, j'ai eu le trac avant d'enregistrer ces séquences audio. Comme un con devant mon micro d'apprenti Youtubeur, à bégayer et bafouiller. Non, ce n'a pas été simple.
Cette première vidéo, un épisode pilote d'une série que j'ai intitulé Dirty Little Hacks, est un pseudo-tutoriel sur la réalisation d'un porte-clé imprimé en 3D à partir d'un dessin. "Pseudo-tutoriel" car je dévoile les différentes étapes sans m'attarder sur les subtilités des outils (leurs menus, ou les fonctions employées), les logiciels à employer et la progression dans la réalisation. L'idée vient d'un atelier que j'ai improvisé avec mes minis-moi lorsqu'ils ont découvert mon imprimante 3D et posé tout un tas de questions sur comment elle fonctionne et son utilité. Je leur ai alors proposé de dessiner leur porte-clé idéal et que je les transformerai en véritable porte-clé imprimés en 3D.
Ceci dit, je n'ai pas fait tout cela en 3 mois pour rien, et vous trouverez ci-dessous la vidéo finale, grâcieusement hébergée sur l'instance Peertube de Tedomum. J'ai aussi monté un repository Github sur lequel je mets sous licence Creative Commons les différents contenus que j'ai produit, dont notamment les pseudo-musiques de fond, et bien sûr les différents fichiers mentionnés dans la vidéo. Sur ce, je vous laisse juger du résultat, et n'hésitez pas à critiquer (en bien ou en mal), partager ou m'envoyer des insultes via Twitter ou mon mail.
J'avais pensé Little Dirty Hacks comme une série de courtes vidéos (pas plus de dix minutes) dans lesquelles je montre des hacks originaux, des réalisations qui n'ont rien à voir avec le monde de la sécurité mais plus liées à du hacking au sens originel, en donnant toutes les clés pour que cela puisse être reproduit.
Si l'accueil est plutôt positif, j'envisage de commettre une nouvelle vidéo et ainsi de continuer cette série, dans le cas contraire je n'insisterai pas et tirerai les leçons de cette tentative. L'échec est toujours une option. Je ne compte toutefois pas, si cette initiative plaît, me forcer à publier régulièrement des vidéos: pas de pub, pas de monétisation, mon rythme, mes règles. A la limite, peut-être mettrai-je en place un Patreon pour permettre à ceux qui apprécient ces petits projets de donner une pièce ou deux afin de financer des projets plus imposants, mais ce n'est pas l'objectif principal.